Le redressement judiciaire d’une entreprise
Dernière mise à jour le 22/02/2024
Une entreprise en redressement judiciaire est une entreprise qui rencontre des difficultés financières et se retrouve en état de cessation des paiements, sans pour autant que sa situation soit irrémédiablement compromise. Tous les types d’entreprises doivent déclarer cet état auprès du tribunal compétent.
Une procédure de redressement judiciaire se déroule en plusieurs phases. De plus, elle emporte divers effets afin de sauver l’activité de l’entreprise.
Qu’est-ce qu’un redressement judiciaire pour une entreprise ?
Un redressement judiciaire est une forme de procédure collective.
Conformément à l’article L 631-1 du Code de commerce, il s’agit d’une procédure mise en œuvre lorsqu’une société rencontre des difficultés et se retrouve en état de cessation des paiements. Cela signifie que ladite société n’est plus en mesure de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
En d’autres termes, la société ne peut plus régler ses dettes avec l’argent qu’elle génère.
Dans une telle situation, le représentant légal de la société doit déclarer cet état au tribunal de commerce compétent.
Ensuite, le tribunal pourra décider de l’ouverture d’une telle procédure, en prononçant un jugement d’ouverture de redressement judiciaire.
Cette procédure a pour but la poursuite de l’activité de l’entreprise et le maintien des emplois, tout en apurant le passif.
Quelles sont les entreprises concernées par une procédure de redressement judiciaire ?
Une procédure de redressement judiciaire peut concerner un grand nombre d’entreprises. Néanmoins, ces dernières doivent rencontrer des difficultés justifiant un tel redressement.
Le type d’entreprise
Au regard de l’article L 631-2 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire est ouverte à toutes les formes d’entreprises.
De ce fait, peuvent bénéficier d’un redressement judiciaire :
- Les personnes physiques exerçant une activité commerciale, artisanale, libérale ou agricole : les entreprises individuelles et les auto-entrepreneurs ;
- Les personnes morales de droit privé : donc toutes les sociétés (EURL, SARL, SAS, etc.) et les groupements d’intérêts économiques (GIE).
De plus, une société ne peut pas faire l’objet de plusieurs procédures collectives simultanées.
Par exemple, si la société fait déjà l’objet d’une procédure de sauvegarde, elle ne peut pas, en même temps, faire l’objet d’une procédure de redressement judiciaire.
Les conditions justifiant un redressement judiciaire
Pour débuter une procédure de redressement judiciaire, l’entreprise doit satisfaire 2 conditions cumulatives :
- Etre en état de cessation des paiements ;
- Ne pas être dans une situation irrémédiablement compromise.
L’état de cessation des paiements est caractérisé par l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible.
De ce fait, pour caractériser un tel état, il faut :
- Déterminer le passif : c’est-à-dire répertorier toutes les dettes exigibles à la date où le juge statue ;
- Déterminer l’actif : il s’agit d’établir la trésorerie et les réserves de crédit de l’entreprise. A titre d’illustration, sont comptabilisés dans l’actif disponible, l’apport en trésorerie effectué par un associé, mis sous séquestre et libérable sous conditions (Cass. com. 29 novembre 2016, n°15-19.474) ou encore un chèque de banque émis au profit de la société même s’il n’est pas encore encaissé (Cass. Com. 18 décembre 2017, n°06-16.350), etc. ;
- Répertorier les fonds apportés par le dirigeant, un associé ou la société mère : ils ne sont pris en considération que si leur financement est normal.
A l’inverse, ne sont pas des actifs disponibles pour déterminer un état de cessation des paiements :
- Les biens mobiliers et immobiliers dont la société est propriétaire ;
- Les créances à recouvrer.
Comment demander l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ?
Afin de débuter une procédure de redressement judiciaire, un tribunal doit être saisi. Cette saisie peut être effectuée par plusieurs personnes, selon la situation de l’entreprise.
La demande d’ouverture d’un redressement judiciaire
Plusieurs personnes sont susceptibles de demander l’ouverture d’une procédure judiciaire :
- Le dirigeant : dans un délai de 45 jours à compter de la date de cessation des paiements de la société. Il peut s’agir du représentant légal de la personne morale, l’entrepreneur individuel ou un administrateur provisoire, s’il en est désigné un par le juge ;
- Un créancier social par une assignation : dans le cas où la société ne fait pas d’ores et déjà l’objet d’une procédure de conciliation ;
- Le ministère public par assignation : également en l’absence d’une procédure de conciliation en cours ;
- Une saisine d’office du tribunal.
Le tribunal compétent
L’organe judiciaire pour ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l’égard d’une société commerciale est le tribunal de commerce dans le ressort duquel la société a son siège social.
En cas de siège social fictif ou en l’absence d’un siège social en France, le tribunal compétent est celui où la société à le principal centre de ses intérêts.
De plus, en cas de transfert de siège social dans les 6 mois avant la saisine du tribunal, le tribunal dans le ressort duquel se trouvait le siège social initial est seul compétent.
Quels sont les justificatifs à fournir au soutien de la demande ?
Afin de justifier la demande d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire auprès du tribunal compétent, les documents à fournir varient selon la nature de l’activité exercée.
Les documents pour une activité commerciale
Les sociétés et les auto-entrepreneurs exerçant une activité commerciale souhaitant bénéficier d’une procédure de redressement judiciaire, devront fournir au greffe du tribunal compétent les documents suivants :
- Le formulaire Cerfa n°10530*01 complété ;
- Le numéro unique d’identification de l’entreprise ;
- L’état du passif exigible et de l’actif disponible ainsi que la déclaration de cessation des paiements ;
- Le nombre de salariés employés à la date de la demande ;
- Le montant du chiffre d’affaires à la date de clôture du dernier exercice comptable ;
- L’état actif et passif des sûretés et des engagements (à l’exception du bilan) ;
- Un rapide inventaire des biens de l’entreprise (pour l’auto-entreprise, il faut distinguer les biens relevant du patrimoine personnel et ceux du patrimoine professionnel et mentionner les actes de renonciation à la protection du patrimoine personnel) ;
- Les comptes annuels du dernier exercice ;
- Une liste des créances et des dettes de moins d’un mois ;
- Une attestation sur l’honneur certifiant l’absence de désignation d’un mandataire ad hoc ou d’une conciliation dans les 18 mois avant la demande.
Les documents pour une activité libérale
Dans le cas de l’exercice d’une activité libérale, les documents à joindre à la demande auprès du greffe du tribunal judiciaire sont les mêmes que ceux à fournir au greffe de la juridiction commerciale.
Il doit seulement être rajouté, le cas échéant :
- La liste des membres responsables solidairement des dettes sociales avec leur nom et leur domicile, en cas de solidarité ;
- La désignation de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente en cas d’exercice d’une profession libérale soumise à un statut réglementé ou législatif protégé.
Comment se déroule l’ouverture du redressement judiciaire ?
Un redressement judiciaire pour une entreprise ne peut avoir lieu que si le juge prononce un jugement en ce sens. Il accomplit des formalités préalables afin d’établir un jugement d’ouverture.
Les auditions préalables à l’ouverture de la procédure
Après avoir été saisi d’une demande d’ouverture de redressement judiciaire et avant de rendre son jugement, le juge doit préalablement étendre :
- Le dirigeant de l’entreprise ;
- Les représentants du comité social et économique (CSE).
De plus, toute personne utile peut également être auditionnée, tel que le commissaire aux comptes d’une SAS, le cas échéant.
Le contenu du jugement d’ouverture
Dans le cas où le juge estime opportun le redressement judiciaire, il prononce un jugement d’ouverture. Ce jugement d’ouverture marque le début de la période d’observation pour l’entreprise.
Ledit jugement d’ouverture contient les renseignements ci-après :
- La date provisoire de cessation des paiements : elle peut être modifiée ultérieurement sans pouvoir être antérieure à plus de 18 mois à compter de la date du jugement d’ouverture ;
- La durée de la période d’observation ;
- Les organes de la procédure de redressement judiciaire.
Les intervenants à la procédure
Les différents acteurs de la procédure de redressement judiciaire sont désignés par le juge dans le jugement d’ouverture :
- Le juge commissaire : chargé du bon déroulement de la procédure et de la protection des intérêts de tous ;
- Un administrateur judiciaire : chargé de la gestion de l’entreprise durant cette période de redressement, il peut notamment établir la comptabilité d’une SAS (il est facultatif si le débiteur à moins de 20 salariés et un chiffre d’affaires HT inférieur à 3 millions d’euros) ;
- Un mandataire judiciaire : chargé de la défense des intérêts des créanciers de l’entreprise après que le dirigeant lui ait transmis la liste des créanciers de l’entreprise, les dettes et les contrats en cours.
De surcroît, le tribunal invite le CSE ou, à défaut, les salariés à désigner un représentant des salariés.
Le tribunal peut également désigner un ou plusieurs experts, notamment une personne chargée de faire l’inventaire et l’évaluation des biens de la société (un commissaire-priseur, un notaire, etc.).
Quels sont les effets du jugement d’ouverture ?
Un jugement d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire emporte divers effets pour la société, pour son dirigeant mais aussi pour les créanciers.
L’ouverture de la période d’observation
Tout d’abord, après avoir fixé la date de cessation des paiements, la période suspecte commence. Elle correspond à la période comprise entre la date de cessation des paiements et la date du jugement d’ouverture.
Cette période suspecte permet d’annuler certains actes accomplis, si besoin, dans l’intérêt du redressement en cours.
De ce fait, le jugement d’ouverture ouvre une période d’observation de 6 mois maximum.
Elle est renouvelable une fois pour 6 mois sur demande de l’administrateur, de l’entreprise en difficulté ou du ministère public. Ce dernier peut demander un second renouvellement de 6 mois, portant la période d’observation à 18 mois.
Durant cette période, l’entreprise poursuit ses activités dans un cadre privilégié et encadré afin de favoriser son redressement.
Les formalités accomplies par le greffe
Le jugement d’ouverture permet au greffier de faire état du redressement judiciaire auprès des organismes suivants :
- Le Registre du commerce et des société (RCS) pour les entreprises ayant une activité commerciale ou le Répertoire des métiers (RM) pour celles ayant une activité artisanale ;
- Le Bodacc ;
- Un journal d’annonces légales.
De plus, le greffe est tenu de notifier le jugement au débiteur dans les 8 jours suivants son prononcé.
Les effets à l’égard du dirigeant
Pendant la procédure, le dirigeant reste en fonction et n’est pas dessaisi de ses pouvoirs. De plus, il continue de percevoir sa rémunération, sauf en cas de réduction de celle-ci par le jugement d’ouverture, par l’administrateur ou par le mandataire.
Toutefois, le juge commissaire peut autoriser l’accomplissement de certains actes par le débiteur et l’administrateur judiciaire pour sauver l’entreprise.
Les comptes de l’entreprise peuvent également être bloqués pendant cette période.
En outre, en cas de nomination d’un administrateur judiciaire, ce dernier peut avoir :
- Des missions exclusives : telles que la décision de poursuivre les contrats en cours, etc. ;
- Des missions complémentaires : elles consistent à assister le débiteur dans les actes de gestion.
Les effets à l’égards des créanciers et des cautions
A l’égard des créanciers et des cautions, un jugement de redressement judiciaire emporte le gel du passif. Il s’agit de l’interdiction du paiement des créances par le débiteur pour toute créance apparue avant le jugement d’ouverture.
En d’autres termes, si un paiement est exigé avant l’ouverture du redressement judiciaire, les créanciers ne peuvent pas poursuivre la société en justice, ni pratiquer des saisies eu égard à des décisions déjà obtenues. De plus, les intérêts et les majorations sont également suspendues.
Les cautions personnes physiques co-obligées de l’entreprise, ayant consenti une sûreté personnelle, peuvent également bénéficier de l’arrêt du cours des intérêts.
A l’inverse, une créance apparue après le jugement d’ouverture, pour les besoins de la procédure ou pour une prestation fournie à l’entreprise, est payée à échéance.
Enfin, durant cette période, il existe un ordre de paiement des créances. En effet, les créances salariales seront payées en priorité, puis ensuite celles permettant d’assurer la pérennité de l’activité.
Les effets à l’égard de l’entreprise et des salariés
Enfin, durant la période d’observation, le dirigeant et l’administrateur judiciaire gèrent l’entreprise et surveillent sa gestion. Le dirigeant continue d’accomplir les actes d’administration et ceux qui ne sont pas réservés à l’administrateur.
A ce titre, tout est mis en place afin de privilégier la poursuite de l’activité. De ce fait, l’exécution des contrats en cours continue, tel que le bail commercial pendant le redressement judiciaire et les contrats de travail.
Si besoin, l’administrateur judiciaire décide de mettre fin à certains contrats dont l’exécution n’est pas nécessaire à la survie de l’activité.
Enfin, s’il existe une possibilité sérieuse de redressement, le dirigeant et l’administrateur vont préparer un plan de redressement avant de le présenter au juge. Ce dernier contient généralement :
- Les perspectives de redressement ;
- Les modalités de règlement du passif et les garanties que peut souscrire le débiteur pour en assurer l’exécution ;
- Le niveau et les perspectives d’emploi.
Son adoption met fin à la période d’observation.
Quelle est l’issue de la procédure de redressement judiciaire ?
L’adoption du plan de redressement met un terme à la période d’observation. De ce fait, son exécution produit des effets sur l’entreprise en redressement judiciaire et clôture la procédure. A l’inverse, si le plan n’est pas exécuté, le débiteur encourt des sanctions.
L’adoption du plan de redressement
Après convocation du débiteur, des délégués du personnel et après avoir informé le ministère public, l’administrateur et le mandataire, le tribunal peut adopter le plan. Toutefois, il ne le fait que s’il existe une possibilité sérieuse que l’entreprise soit redressée.
Ce plan de redressement est établi pour une durée maximale de 10 ans. Pendant toute la durée du plan, un administrateur ou un mandataire est désigné pour veiller à son exécution.
En effet, ce plan permet d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise, maintenir l’emploi tout en apurant le passif.
A ce titre, le plan adopté doit obligatoirement mentionner :
- Les personnes tenues de l’exécuter ;
- Sa durée (dans la limite de 10 ans) ;
- Le règlement des dettes et les éventuels licenciements économiques, ainsi que les perspectives d’emploi ;
- Les éventuels modifications statutaires de l’entreprise en difficulté ;
- La prise d’acte des délais et les remises acceptées par les créanciers antérieurs.
Il peut également être prévu dans le plan, le remplacement des dirigeants, des licenciements ou encore l’arrêt ou la cession de certaines activités.
L’exécution du plan et la clôture de la procédure de redressement judiciaire
Si l’entreprise effectue le plan de redressement et dispose des ressources nécessaires pour désintéresser les créanciers et payer les frais de procédure, l’administrateur judiciaire rédige un compte-rendu de mission.
Ensuite, le tribunal met fin à la procédure de redressement judiciaire.
Dans ce cas, les activités de l’entreprise se poursuivent telles qu’elles étaient avant la procédure collective. De plus, le dirigeant redevient titulaire de toutes ses fonctions.
A l’inverse, si le plan prévoit une cession partielle ou totale de l’entreprise, la reprise de l’activité pour les salariés à lieu avec le dirigeant qui reprend l’entreprise.
Enfin, si l’exécution du plan et le redressement s’avèrent impossibles, le tribunal ordonne la liquidation judiciaire de la société, afin de parvenir à sa dissolution.
L’inexécution du plan
Enfin, si le débiteur ne parvient pas à exécuter ses engagements dans le délai fixé par le plan de redressement, le juge prononce sa résolution, c’est-à-dire son arrêt. Dans un même temps, il prononce la liquidation judiciaire de l’entreprise.
Cela fait suite à la demande du procureur de la République, de l’administrateur judiciaire ou des créanciers.
FAQ
Qui paie les salaires en cas de redressement judiciaire ?
Si l'entreprise placée en redressement judiciaire dispose des ressources nécessaires, elle continue de payer les salaires de ses salariés. Dans le cas contraire, c'est l'AGS qui assure ce paiement. Toutefois, cela ne vaut que pour les salaires dus avant la procédure de redressement judiciaire. Ceux dus après le redressement judiciaire restent à la charge de l'employeur.
Qui peut placer une entreprise en redressement judiciaire ?
C'est le juge du tribunal de commerce qui prononce le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire pour les entreprises exerçant une activité commerciale. Pour celles exerçant une activité libérale, le tribunal judiciaire est compétent.
Qui peut présenter un plan de redressement ?
Durant la période d'observation, le dirigeant et l'administrateur élaborent un projet de plan de redressement pour l'entreprise. Ce projet est ensuite présenté au tribunal. Il l'adopte si la situation de l'entreprise n'est pas irrémédiablement compromise.
Dernière mise à jour le 22/02/2024
Bonjour Mr , Je suis en RJ depuis le 13.11.2019 . Nous avons été reconduit jusqu’au mois mai par le tribunal de commerce . Suite à ceci , j’ai décidé de mettre en vente avant de perdre tous les marchés encours et à venir . En date du 14.02.2020.l’administrateur a mis l’ouverture des plies le 17.03.2020.12h . Le 17 mars pas d’offre , nous sommes rentré en confinement ( chaumage partielle de l’entreprise ). Aujourd’hui j’ai géré du mieux possible cette situation que je ne souhaite à personne, malgré les perte de chiffre dû au redressement j’ai pu gérer ma… Lire la suite »
Bonjour
Merci pour votre question. C’est un sujet délicat en l’occurrence, nous vous conseillons de contacter un avocat qui saura vous renseigner.
L’équipe LegalPlace
Bonjour,
Peut-on changer de dirigeant pendant la période durant laquelle est appliqué le plan de continuité de l’activité ?
Merci.
Bonjour,
Dans une telle situation, il est recommandé de consulter le mandataire ou l’administrateur judiciaire s’il en a été désigné un par le tribunal de commerce.
En vous souhaitant une agréable journée.
L’équipe LegalPlace